jeudi 27 mars 2014

L’accès à l’eau potable, une galère quotidienne



Le Nouvelliste | Publié le : 26 mars 2014
Malgré les sommes importantes injectées dans le secteur hydraulique depuis des décennies, l’approvisionnement de la région métropolitaine en eau potable reste un véritable défi pour les acteurs nationaux et internationaux. De jour en jour, la population se plaint de la rareté et de la mauvaise qualité de l’eau.

C’est un fait. Haïti fait face à des défis considérables dans le secteur de l’eau potable et de l’assainissement. Malgré l’aide externe et la volonté déclarée du gouvernement de renforcer les institutions du secteur, la population ne cesse de se plaindre de la rareté et de la mauvaise qualité de l’eau. Si l’eau qui coule dans les robinets des riverains n’est pas salée, elle est toutefois très encrassée. Plaisanterie de mauvais goût ! L’instance chargée de contrôler la qualité de l’eau se dit très limitée. « La Direction nationale de l’eau potable et de l’assainissement (Dinepa) connaît de sérieux problèmes tant au niveau de la gestion de l’eau qu’au niveau de sa qualité », explique la directrice de l’assainissement à la Dinepa, Edwige Petit.

Selon Mme Petit, la vétusté des captages, les constructions anarchiques et la dégradation de l’environnement sont autant de problèmes qui empêchent à la Dinepa de desservir la population. En outre, elle ajoute que la Dinepa est incapable d’assurer la durabilité de l’eau. « Le service n’est pas en mesure de suivre la démographie, est-ce pour cela que l’eau est moins accessible dans les zones les plus peuplées. Des fois, une panne de 25 gourdes peut empêcher la distribution de l’eau pendant plus d’une semaine », indique-t-elle.

L’eau est aussi en manque dans les quartiers défavorisés de Port-au-Prince. A Décayette, Jalousie, Solino, Village de Dieu, et Carrefour-Feuilles, les riverains sont très critiques envers les responsables de la Dinepa. « Ici, les gens n’ont pas accès à l’eau, tandis qu’elle est un élément indispensable. Ils sont obligés d’attendre pendant des heures à la fontaine publique afin d’apporter un seau d’eau chez eux. Malgré, les nombreuses requêtes que nous avons envoyées aux responsables de Dinepa depuis des mois pour résoudre ce problème, personne n’est venu», témoigne un responsable du comité de l’eau à Jalousie.

L’Action contre la faim monte au créneau
Dans un communiqué rendu public, le vendredi 21 mars, à l’occasion de la Journée internationale de l’eau, l’Action contre la faim (ACF) dit déplorer le fait que plus d’un milliard de personnes n’ont pas accès à un point d’eau amélioré alors que le droit à l’eau est reconnu comme un droit humain depuis le 28 juillet 2010. « 80 % des maladies connues dans le monde sont liées de manière directe ou indirecte à la mauvaise qualité de l’eau utilisée quotidiennement par les populations les plus vulnérables » indique le communiqué, soulignant qu’en Haïti près de 40% des personnes vivant des les zones rurales les plus isolées n’ont pas accès à un point d’eau amélioré.

En ce sens, l’ACF dit mener aujourd’hui des activités dans les départements de l’Ouest, de l’Artibonite et du Nord-Ouest à travers plusieurs programmes en Eau/Assainissement/Hygiène en partenariat avec l'UNICEF et l’Union européenne en vue de venir en aide à la Dinepa. « Ces activités ont pour objectif de réduire les risques liés à des maladies telles que le choléra, l’hépatite ou encore la fièvre typhoïde », précise la note.

En 2013, relève le communiqué, plus de 266 000 personnes, parmi lesquelles 33 000 enfants de moins de 5 ans, ont bénéficié du support de l’ACF, grâce à ses différents programmes d’appui à la création et à la structuration des systèmes de gestion communautaires et sociaux des points d’eau comme les CPE et les CAEPA. Mais aussi grâce à une filière de production et de distribution de produits de traitement de l’eau à domicile fabriqués en Haïti, par une entreprise haïtienne.

Malgré les promesses des acteurs nationaux et internationaux, le problème reste entier. A Port-au-Prince, comme dans les villes de province, la quête de l’eau est la galère quotidienne des riverains. Si on ne marche pas pendant des heures pour en trouver, on grille cependant une bonne partie de la journée à faire la queue dans les fontaines publiques afin d’apporter chez soi quelques seaux d’eau. Selon le directeur du centre d’exploitation de la région métropolitaine, Théodate Paul Lydbenson, les cent seize mille mètres cubes d’eau disponibles par jour sont nettement insuffisants pour les riverains de l’aire métropolitaine qui frôlent les deux millions d'habitants.
Joubert Rochefort
jrochefort@lenouvelliste.com


dégradation de l’environnement en Haïti



Le Nouvelliste | Publié le : 26 mars 2014
L’hôtel El Rancho a accueilli, le week-end écoulé, le lancement officiel du 10e congrès biannuel de l’Association interaméricaine des ingénieurs sanitaires (AIDIS) autour du thème « Les technologies vertes, un tournant décisif vers le développement durable dans les Amériques ». Dans cette rencontre de trois jours, des ingénieurs sanitaires, des chimistes, des médecins hygiénistes et des spécialistes de l’environnement haïtiens et étrangers discuteront sur la nécessité de prévenir la dégradation de l’environnement en Haïti.

Il est 6h30 p.m. A l’entrée de la salle Epicure, les retrouvailles sont au premier rang. Des vieilles connaissances se saluent et discutent de l’importance des technologies vertes dans un pays comme Haïti où la dégradation de l’environnement se fait au galop. « Il est important que nous soumettions un rapport de nos recherches au gouvernement afin de sauvegarder ce qui reste de l’écosystème du pays », lance l’un des participants. Dans la salle, une dizaine de filles en robe noire portant chacune une écharpe sur laquelle sont inscrits, les noms des pays membres de l’AIDIS offre un spectacle de grande envergure. Chacune d’entre elles défilent avec un drapeau en main au rythme d’une musique phare du pays représenté.

7h. Le président du comité organisateur, Louis Christian Patrick Baptiste, ouvre officiellement le 10e congrès biannuel de l’Association. Selon lui, ce congrès entend proposer des solutions pour améliorer la qualité de vie, proposer des perspectives d'évolution de production et d'exploitation de l'énergie. « Jusqu'à date, dit-il, Haïti est le seul pays de l’Amérique latine qui ne dispose pas d’un système de collecte et d’épuration des eaux usées ». Il croit que les technologies vertes sont les seuls éléments qui peuvent contribuer à l'amélioration de la qualité de l'environnement en réduisant des rejets toxiques dans l'air, dans l'eau ou dans le sol. En outre, elles assurent l’économie et l'utilisation de ressources renouvelables.

A l’instar des pays de l’Amérique, la préservation de l’environnement en Haïti est un enjeu majeur. La négligence des autorités est de plus en plus visible. La moindre goutte de pluie suffit pour détruire des vies et des biens. A Port-au-Prince et dans les villes de province, le recyclage des déchets, le traitement des eaux usées et le développement des énergies renouvelables deviennent de plus en plus importants. A en croire l’ingénieur Baptiste, ce congrès permettra non seulement de réduire la vulnérabilité de l’environnement marin, mais aussi d'optimiser l'exploitation des énergies, et de trouver des solutions à long terme pour prévenir la dégradation de l'écosystème.

« Nous de l’AIDIS et de l’AIDISH, nous pensons qu’il est inévitable de réduire cet impact nocif et d’améliorer la qualité de vie en recherchant des solutions socialement équitables, économiquement viables et écologiques devant nous conduire au développement durable », explique le président du comité.

Le président de l’AIDIS, le Colombien Jorge Triano Soto, croit lui aussi que les technologies vertes permettent de réduire cet impact nocif et améliorent la qualité de vie et les perspectives d'évolution de production et d'exploitation de l'énergie. « L'activité humaine, dit-il, provoque des bouleversements environnementaux et les moyens de production industriels ou chimiques exacerbent la dégradation de l'environnement. » Dans la foulée, il appelle le peuple haïtien à la sauvegarde de son riche écosystème. « la préservation de l'environnement, ajoute-t-il, est l'un des éléments majeurs qui détermine l'avenir du pays.»
Joubert Rochefort
jrochefort@lenouvelliste.com

La FIDH apporte son appui aux organismes de défense des droits humains



Le Nouvelliste | Publié le : 26 mars 2014
Actuellement en mission dans le pays, une délégation de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) entend apporter son soutien aux organisations de défense des droits humains engagées dans la lutte pour l'aboutissement du procès de Jean-Claude Duvalier accusé de crime contre l'humanité.
                                                           
Trois ans après le retour de Jean-Claude Duvalier au pays, les procédures judiciaires engagées contre lui font encore des vagues. L’ordonnance du juge Carvès Jean, envoyant l’ex-président au tribunal correctionnel pour corruption et détournement de fonds publics a attiré l’attention de plus d’un. La Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) a dépêché une mission en Haïti en vue de s’assurer que Jean-Claude Duvalier soit jugé pour les crimes qu’il a commis.

« Par cette décision, souligne le président d'honneur de la FIDH, Patrick Baudouin, les autorités haïtiennes ont envoyé un signal fort en faveur du rétablissement de l'Etat de droit.» Toutefois, il dit espérer que les autorités concernées prendront toutes les mesures nécessaires afin d'aboutir à un procès historique.

Selon la coordinatrice de la FIDH, Clémence Bectarte, le dossier de Duvalier est très emblématique. La militante ajoute que ce dossier sera révélateur de la capacité de la justice haïtienne de rendre justice aux victimes qui ont le courage de porter plainte. Elle critique les avocats de Duvalier qui font croire que la décision de la cour d'appel aurait été imposée par des ONG internationales.

« C'est une manœuvre dilatoire pour décrédibiliser le verdict de la cour d'appel qui n'a fait qu'appliquer le droit international en l'incorporant dans le droit haïtien pour pouvoir juger Jean- Claude Duvalier et reconnaître l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité commis sous son régime », a rétorqué Mme Bectarte.

Des décisions similaires ont été rendues par la Cour suprême au Chili et en Argentine, rappelle le défenseur des droits humains, encourageant les autorités haïtiennes à laisser le dossier suivre son cours sans aucune interférence politique.

La lutte contre l'impunité est absolument fondamentale. Elle permet de protéger la société haïtienne contre, éventuellement, de nouvelles dérives, a dit la militante des droits de l'homme, qui dit espérer vivement que la décision de la cour d'appel sera arrêtée car elle est juridiquement fondée.

Après les instructions du juge Duret, les avocats de Duvalier, qui ont d'ailleurs porté l'affaire en cassation, auront à présenter leurs arguments au cours d’un débat contradictoire à l'issue duquel les juges décideront de confirmer ou de rétracter la décision prise en février dernier à la cour d'appel.


Joubert Rochefort
jrochefort@lenouvelliste.com

vendredi 21 mars 2014

L’OIM présente des solutions au déplacement urbain

Le Nouvelliste | Publié le : 19 mars 2014
L’Organisation internationalede la migration (OIM) a présenté, lundi 17 mars, à l’hôtel Montana, les résultats d’une étude sur les solutions durables au déplacement urbain après une catastrophe. Dans cette étude, les rapporteurs présentent les défis auxquels font encore face les déplacés quatre ans après le séisme de janvier 2010 et les opportunités que le gouvernement et les bailleurs doivent saisir pour sortir le pays de ce marasme.




Réalisée par Brookings, cette étude passe au crible la situation lamentable des déplacés quatre ans après le passage du tremblement de terre du 12 janvier 2010 qui a emporté des vies et des biens. Aujourd’hui, près de 147 000 personnes croupissent encore dans 271 camps éparpillés dans les différentes zones de la région métropolitaine. Même si ce nombre représente une diminution très prononcée, le rapport explique que les conditions de vie des familles qui occupent encore les camps d’hébergement se détériorent quotidiennement.

« 60,9% des déplacés à la suite du séisme rapportent que leurs conditions générales de vie se sont dégradées depuis le séisme. De plus, 67% des ménages déplacés indiquent qu’ils n’ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins fondamentaux. Aussi, 19, 8% des déplacés se disent en situation d’insécurité dans leurs lieux de résidence actuelle », poursuit le rapport.

L’accès au service de base continue à être un véritable casse-tête pour les déplacés. Selon le rapport, les familles déplacées vivent la galère au quotidien. Tout est en constante diminution. L’eau de 17%, les latrines de 8,6% et les soins de santé de 4,1%. Les impacts négatifs du séisme du 12 janvier 2010 sur le logement sont encore visibles. Des familles déplacées qui se trouvaient bien avant le séisme dans des conditions précaires sont à présent deux fois plus susceptibles de voir leurs conditions de logement se dégrader. Elles vivent dans un piteux état de promiscuité loin des normes hygiéniques.

Le chef de mission de l’OIM, Grégoire Goodstein, croit que « le soutien aux solutions durables doit être inclusif au sens où les besoins des populations déplacées dans les quartiers défavorisés ne doivent pas être négligés ». Cependant, dit-il, il est clair que la résolution durable du déplacement est essentielle pour renforcer la résilience et assurer que tous les Haïtiens puissent bénéficier équitablement du développement et jouir de l’entièreté de leurs droits humains.

Dans la même veine, le chef de mission de l’OIM indique qu’il ne s’agit pas simplement de fermer les camps si l’on veut parvenir à des solutions durables au déplacement interne. Il explique que les approches uniformes pour aider les personnes déplacées à quitter les camps requièrent une réflexion et une révision stratégiques. Des approches plus adaptées peuvent aider à assurer que les besoins et les vulnérabilités spécifiques des personnes déplacées soient pris en compte ainsi qu’à maximiser leur contribution à la résolution durable du déplacement. De plus, il est important de faire des interventions au niveau communautaire.

Si le gouvernement et les bailleurs de fonds veulent à prix améliorer les conditions de vie des déplacés, les rapporteurs indiquent que leurs interventions doivent prendre en compte un besoin particulier en matière de plaidoyer et d’engagement politique à tous les niveaux en vue de surmonter les barrières structurelles aux solutions durables.

Parmi les solutions proposées, les rapporteurs invitent le gouvernement à augmenter le soutien pour l’engagement des acteurs locaux ainsi qu’au renforcement de l’appui intersectoriel pour les solutions durables liant des interventions telles que des subventions de loyer, des programmes de moyens de subsistance, des programmes pour accéder à la documentation, des services financiers et de micro-crédit dans les communautés affectées par le déplacement. « Le déplacement n’est pas simplement une question humanitaire, mais un défi important au développement. Il est important d’intégrer le déplacement et les solutions durables dans des plans et politiques pertinents au niveau local, national et international. »

De plus, ils soulignent que les resprésentants de l'Etat et la communauté internationale doivent converger leurs efforts afin de limiter les risques de catastrophe comme éléments-clés des solutions durables. Selon eux, la protection et les appuis aux solutions durables à travers des plaidoyers plus concertés et soutenus sur les évictions illégales des camps et communautés et de la formation sur les standards d’éviction pour les forces de police doivent être inévitablement renforcés. 





Joubert Rochefort
jrochefort@lenouvelliste.com